• Bastien
  • 03/09/2020
  • Focus espèce
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Vous souhaitez être accompagnés pour apprendre à réaliser un suivi photographique du Pic Noir ? Nous proposons des stages spécifiques à cette espèces d’un à trois jours. Pour plus d’informations cliquez ici ou contactez-nous

S’il y a un oiseau emblématique des grandes forêts françaises c’est bien le pic noir ! Avec son envergure de 75 cm il est de loin le plus grand des pics européens. Aujourd’hui présent dans quasiment tous les grands massifs forestiers de France, son observation est loin d’être évidente. Photographier le pic noir est donc un réel défi ! C’est un challenge que j’ai eu la chance de relever en 2019 en forêt de Mormal. De sa recherche jusqu’à l’envol des jeunes, voici toute la démarche que j’ai utilisé pour vivre des moments inoubliables en compagnie des pics noirs. 

Où trouver des pics noirs ?

Comme mentionné précédemment, le pic noir est présent dans quasiment toutes les forêts de hautes futaies de France. Autrefois, il était considéré comme un oiseau de montagne, ne nichant que dans les forêts de conifères ou les forêts mixtes. Aujourd’hui, il a colonisé les plaines et affectionne autant les forêts de pins que celles de hêtres. Le pic noir privilégie toutefois les forêts de grands arbres espacés.

Habitat du pic noir : l'hêtraie

Une hêtraie

Contrairement à beaucoup d’espèces d’oiseaux, le pic noir se porte plutôt bien en France. Sa population a tendance à augmenter et il colonise les zones de plaines depuis quelques dizaines d’années. Sa présence en forêt de Mormal est l’illustration du développement de son aire de répartition sur les zones de plaine.

Reconnaître le mâle et la femelle

Un dimorphisme sexuel existe chez le pic noir. Le mâle possède une calotte rouge entière alors que la femelle a seulement une tache rouge à l’arrière du crâne.

Mâle pic noir

Le mâle

Femelle pic noir

La femelle

Comment trouver des pics noirs ?

Tendez l’oreille !

Avec son cri puissant et son tambourinage pouvant être audible jusqu’à quatre kilomètres, vous n’aurez pas trop de difficultés à entendre le pic noir. Avec un territoire allant de 500 à 1000 hectares, l’observer est toutefois bien moins évident. 

Pour le trouver, il n’y a donc pas 15 000 secrets, il vous faudra arpenter la forêt à la recherche des traces laissées par le pic noir. Au préalable, utiliser les vues aériennes disponibles sur google maps ou géoportail pour identifier les zones pouvant potentiellement accueillir du pic noir (haute futaie et arbres espacés entre eux). 

Astuce !

Faites ce travail de repérage en hiver, la végétation est beaucoup moins dense cela favorisera les observations et votre prospection. De plus, en fin d’hiver les couples se forment et marquent leur territoire. Les amoureux sont donc particulièrement bruyants !

Trouvez des zones de nourrissage

Pour se nourrir en insectes xylophages (qui se nourrissent de bois), il perfore l’écorce d’un arbre (souvent mort) ou d’une souche grâce à son bec puissant laissant au pied de l’arbre des copeaux de grandes dimensions.

Important, le pic noir apprécie avoir à proximité de sa zone de nidification, ces sources de nourriture… 

Zone de nourrissage du pic noir

Nourrissage

Trouvez une loge, lieu de nidification

Qu’est ce qu’une loge ? Une loge est une anfractuosité créée par l’oiseau dans un arbre de manière à pouvoir y nicher en toute sécurité à l’abri des prédateurs et des intempéries. Chez le pic noir c’est Monsieur qui construit ou rénove une ancienne loge à la fin de l’Hiver.

Les loges de pics noirs ont des dimensions bien plus importantes que celle des autres pics, vous ne pourrez vous tromper. La largeur est de 8 à 9 cm et sa hauteur de 11 à 14 cm. De plus, sa forme est ovale contrairement à celle du pic épeiche par exemple qui est ronde.

Une loge de pic noir

Une loge

Ces loges sont situées sur des arbres vivants et de grande taille, il peut y avoir une à plusieurs loges par arbre. Elles sont construites en hauteur entre 6 et 15 mètres de hauteur de manière à se protéger des prédateurs tels que la martre des pins. Les hêtres sont particulièrement appréciés par les pics noirs pour y construire la loge. Grâce aux écorces lisses du hêtre les prédateurs ont ainsi beaucoup plus de difficultés à y grimper. Afin de faciliter les allers et venues à la loge, l’entrée doit être dégagée et dépourvue d’obstacles tels que des branches. D’ailleurs, les arbres abritant une loge sont également vierges de branches en dessous de la loge, pour la même raison que précédemment : se protéger des prédateurs.

En résumé :

  • lDimensions de la loge : largeur de 8 à 9 cm et hauteur de 11 à 14 cm ;
  • lEmplacement de la loge : entre 5 et 20 mètres de haut ;
  • lOrientation de la loge : aléatoire mais toujours vers une zone dégagée ;
  • lEssence de l'arbre : généralement du hêtre ou du pin sylvestre ;
  • lCaractéristiques de l'arbre : de grande taille, en bon état et dépourvu de branche sur sa partie inférieure.

Ne vous éparpillez pas

Le territoire du pic noir est extrêmement grand, alors pour me retrouver j’ai adopté une méthodologie assez scolaire certes, mais efficace : j’ai utilisé un système de gommettes. Par un code couleur j’inscris sur une carte de la forêt, préalablement imprimée sur des feuilles A4 assemblées, le type de contact réalisé : s’il s’agit d’une loge, d’une zone d’alimentation, ou d’un signalement audio. Ainsi je bénéficie d’un territoire restreint fréquemment occupé par un couple et je me remémore sans aucun souci l’emplacement des loges trouvées, car ce sont surtout les loges qui nous intéressent…

Exemple de carte (nous avons changé l’emplacement des contacts)

Quelques astuces :

  • lRéaliser votre prospection si possible par temps gris, cela vous permettra d’éviter de passer à côté d’une loge ! Car croyez-moi, à contre-jour vous n’apercevrez pas grand-chose !
  • lPour ma part je prospectais en réalisant des zigs-zags de manière à être le plus efficace possible lors de ma prospection.
  • lPour trouver des loges très facilement, repérez les arbres marqués, souvent d’un triangle. Il s’agit des arbres présentant un intérêt écologique et qui seront épargnés par les coupes.
Photographier le pic noir : déplacements en zig-zag

Déplacement en zig zag

Quand photographier le pic noir ?

Prospectez en hiver…

Vous l’aurez compris trouver une loge occupée est le meilleur moyen de photographier le pic noir. J’insiste sur le mot occupé car attention aux faux espoirs ! Une loge, même rénovée en fin d’hiver, peut ne pas être occupée ! J’en ai malheureusement fais l’amère expérience… La loge n’est peut-être pas au goût de madame, est inondée par les pluies, ou a été volée par une autre espèce : martre des pins, chouette hulotte, pigeon colombin… De plus le pic noir n’utilise pas forcément la même loge d’une année à l’autre !

Les loges sont construites ou rénovées à la fin de l’Hiver, la couvaison a lieu entre la mi-avril et début mai, c’est le bon moment pour vérifier si une loge est occupée en utilisant un affût ! Le couple se relaie environ toute les deux heures.

… Photographiez au printemps

En plus d’être dans une période très sensible, le pic noir est une espèce assez craintive, vous devrez vous faire très discret en prenant l’ensemble des précautions nécessaires pour ne pas déranger le couple !

Deux semaines après le début de la couvaison (donc entre début et mi-mai) les œufs éclosent. Le dur travail de parent va alors débuter. Un balai de nourrissage débute, toutes les heures environ un adulte vient nourrir les jeunes (parfois un aller-retour peut se faire en 30 minutes comme en 3 heures…). Lors des premiers jours de nourrissage, les adultes peuvent rester de longues minutes dans la loge pour s’occuper des nouveaux nés. Au fil des jours, leur passage à la loge sera de plus en plus rapide.

Les adultes de pic noir avalent au fur et à mesure les aliments trouvés pour ensuite régurgités directement dans le bec des oisillons. A l’inverse, les pics épeiches alimentent directement les jeunes ce qui explique les allers-retours beaucoup plus fréquents.

Vers la mi ou fin mai, les premières observations des jeunes sont possibles. Ils dépassent tout d’abord timidement la tête lors de l’arrivée des parents, quelques jours plus tard ils seront beaucoup plus francs et même agressifs envers les adultes !  

Un bon mois après leur naissance les jeunes quitteront le nid encouragés par les cris et les tambourinages des parents. Les jeunes se disperseront alors dans un périmètre proche de la loge accompagnés et guidés par leurs parents. C’est à ce moment-là que s’achève souvent une très belle aventure avec les pics noirs…

Jeune pic noir

Jeune pic noir quelques heures avant l’envol

Envol du jeune pic noir

Même si les conditions de photographie seront plus délicates, il est possible de photographier le pic noir hors période de reproduction. Chaque adulte utilise une loge qu’il occupe seul. La loge « dortoir » est le plus souvent une vielle loge. En général, à moins d’un dérangement, le pic noir utilise le même dortoir tout l’Hiver. Le pic noir a pour habitude d’arriver à la loge environ une heure avant le coucher du soleil. Pour vous donner une idée, nous sommes début mars et je vois arriver les pics noir sur leur dortoir vers 18h. Son arrivée à la loge est bruyante, en émettant ses cris caractéristiques. Attention, même si ce n’est pas la période de reproduction, veillez à ne pas les déranger, commencer les affûts assez loin de la loge. J’apprécie suivre les pics noirs en fin d’Hiver car les ambiances sont particulièrement belles et les comportements liées à la reproduction sont très sympas à observer (tambourinage, chant, parade, cris territoriaux).

Pic noir

Pic noir à l’entrée du dortoir

Comment photographier le pic noir ?

Le matériel à utiliser

  • NUne longue focale (plus de 500 mm) permettant un éloignement suffisant de la loge pour limiter le dérangement ;
  • NUn affût digne de ce nom : personnellement j'utilisais un affût fantôme des bois. Une tente d'affût ou un filet de camouflage intégré à un buisson seront également adaptés ;
  • NUne housse anti-bruit
  • NUne chaise confortable ! Les allers-retours sont peu fréquents et si vous souhaitez faire de belles observations plusieurs heures d'affût seront nécessaires.

Les réglages à effectuer

Comme en général pour la photographie animalière, je vous préconise de passer en mode « priorité à l’ouverture » de manière à bénéficier de la meilleure vitesse possible. Les conditions en sous-bois sont souvent peu lumineuses, il vous faudra très certainement monter en ISO afin de bénéficier d’une vitesse de déclenchement raisonnable (1/200s au minimum). Si vous souhaitez faire la photo du pic en vol juste avant son arrivée à la loge faite en sorte de prévoir une vitesse avoisinant les 1/3200s tout en anticipant son arrivée et en mode rafale (si vous disposez d’une housse anti-bruit et à distance raisonnable de la loge).

L’utilisation d’un déclencheur à distance est un bon moyen pour gagner en proximité et limiter le dérangement !

N’hésitez pas à rendre vos photos originales en testant des contre jours, un clair-obscur, en jouant avec le bokeh, le pic noir est très photogénique !

Pic noir
Pic Noir
Pic noir
Pic noir
Pic noir

Avant de clore cet article je tenais à remercier particulièrement Marc Albrecht qui m’a aidé dans lors de mes débuts avec le pic noir. D’ailleurs, n’hésitez pas à aller faire un tour sur sa page dédiée au pic noir, vous y trouverez de superbes images.

Bastien

7 Commentaires

  1. Grillon

    Bonjour
    J’affectionne particulièrement cet oiseau et j’ai aimé la description que vous en faite.
    Bien cordialement
    JMarc

    Réponse
    • Bastien

      Bonjour Jean-Marc !
      On se comprend alors ! C’est vrai qu’il en impose et qu’une certaine prestance se dégage de cet oiseau ! J’en suis tombé totalement amoureux depuis maintenant 4 ans.
      Merci pour votre message !
      Au plaisir.
      Bastien

      Réponse
  2. PREVOST

    Bravo
    Superbe description

    Réponse
  3. Stef

    excélent votre site, je suis tombé dessus par hasard, et quel bel hasard, je me régale, bravo

    Réponse
    • Bastien

      Un grand merci Stéphane pour ces commentaires ! Ca fait toujours super plaisir d’avoir ce type de retour ! On espère que cette visite vous a plu ! Si vous souhaitez être mis au courant de la publication de nos prochains articles, il y a une inscription possible à notre newsletter dans l’onglet « Contactez nous » 🙂 Au plaisir !

      Réponse
  4. Gregoire

    Bonjour et bravo pour votre travail! j’aurais quelques questions concernant le Pic Noir sur lequel je passe du temps dans le cadre de mes activités de photographe amateur.
    J’ai fait plusieurs semaines d’observations (d’abord sonores, puis identification loges, ensuite rares observation pics) depuis plusieurs semaines.
    lors du dernier affut, j’ai constaté des choses qui m’interrogent:
    Je souhaitais savoir si 2 ouvertures de loges proches l’une de l’autre sur un même arbre, mais orientées différement, pouvaient être connectées à l’intérieur du tronc , ou alors est il juste de croire qu’une ouverture = une loge.
    Si une loge peut avoir plusieurs ouverture, y a t’il un possible scenario d’utilisation? (rentrée par une ouverture et sortie par une autre?: pas vu ou avéré )
    Est il possible qu’un couple soit déja constitué à fin novembre et qu’il occupe une loge à deux à cette date? (observé)
    Est il possible que le couple « occupe » également d’autres loges distantes 50m-100m en même temps? (j’ai l’impression de les entendre à 2 endroits identifiés comme « loges à Pics noir ») et qu’elle type d’activité peuvent ils avoir entre les 2 loges.
    Enfin, Y a t’il des tranches horaires plus propices à la chasse au insectes sous les écorces de sapin , et la zone de nourrissage est elle grande ou limitée?
    D’avance merci pour vos réponse éclairées.

    Réponse
    • Bastien

      Bonjour Grégoire ! C’est un vrai plaisir de lire tes questions et ca me laisse penser que toi aussi tu as été infecté par ce virus « pic noir » 😉
      Cela fait déjà quelques années que je suis le pic noir mais j’ai de nouvelles interrogations à chaque saison… Je discute fréquemment avec d’autres photographes et certains comportements nous laisse sans explication…
      Je vais essayer de répondre à tes questions ou en tout cas, te donner mon sentiment:
      – 2 ouvertures côte à côte peuvent être connectées mais ce n’est pas toujours le cas. Une loge est profonde d’environ 50cm, on peut donc penser que si l’ouverture du bas est distante de moins de 50cm par rapport à l’ouverture du haut alors celles ci sont connectées. Si ce n’est pas le cas le pic noir ne s’amusera pas à creuser plus profondément sa loge pour connecter les différentes ouvertures.
      – Ca m’est déjà arrivé de voir de voir un pic noir rentré dans une ouverture et ressortir dans une seconde mais il s’agissait juste d’une visite de loge de sa part en hiver et en préparation de la saison de repro. Généralement ils utilisent pour la repro un arbre qui comporte qu’une seule loge…
      – Le couple est fidèle toute leur vie à moins d’un accident pour l’un d’entre eux, donc oui il est possible de les observer à ce moment de l’année. Ce que je remarque sur les dortoirs (hors période de repro) c’est que chaque individu à son propre arbre pour y dormir. Pour ma part je n’ai jamais trouvé d’arbre dortoir comprenant plusieurs individus de pic noir. Il est déjà arrivé que le partenaire essaye d’occuper la même loge que son partenaire, il s’est fait chasser de là … Par contre il m’arrive fréquemment de voir certains arbres abriter un pic noir mais aussi un ou plusieurs individus de pic vert.
      – En effet, comme je le dis plus haut j’observe généralement une séparation du couple à l’heure du sommeil. Chacun occupe gagne son dortoir et avant de rentrer à la loge ils émettent pendant quelques secondes des cris. J’imagine que ce vocalisme est un cri de contact pour son partenaire qui est souvent dans les parages. Sur les dortoirs que je suis j’ai l’impression que le couple est distant d’environ 500m voire 1km mais j’imagine que cette distance peut être moins importante. J’imagine que cette distance est également dépendante de l’habitat disponible notamment en arbre propice…
      – La zone de chasse est en effet très grande.. Le territoire d’un pic noir est estimé à une centaine d’hectares… Difficile de prédire une zone exacte de nourrissage. Je n’ai pas forcément relevé d’heures spéciales pour se nourrir. Il se lève assez tard et se couche assez tôt, c’est juste ce que je peux t’apporter comme réponse.
      Bonne chance pour ta quête, c’est vraiment une espèce passionnante qui te ferra parfois te poser pas mal de questions… 😉 Il faut toutefois accepter que tout n’est pas forcément explicable 😉
      Au plaisir
      Bastien

      Réponse

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