- Bastien
- 03/11/2023
- Focus espèce
Les chouettes et hiboux sont très prisés par les photographes. Effraie des clochers, Chevêche d’Athéna, Hibou Grand-Duc et Petit-duc,… ces espèces nous font vibrer par leur prestance et leur comportement si particulier. Parmi ces rapaces nocturnes, le Hibou Moyen-Duc a l’avantage de se laisser facilement observer et photographier du moment que l’on a réussi à mettre le doigt dessus.
J’avais réussi à suivre l’espèce uniquement au dortoir avant de m’y pencher plus sérieusement en 2023. Cette année-là j’ai pu suivre deux familles dont un couple qui a niché dans notre jardin, je n’en demandais pas moins ! Vous n’aurez très certainement pas tous la chance de les accueillir chez vous, mais trouver un coin à Hibou Moyen-Duc et le photographier est relativement abordable et c’est ce que nous allons voir dans cet article.
Où trouver le hibou moyen-duc ?
L’autre avantage du Hibou Moyen-Duc c’est d’être présent quasiment partout en Europe et en France ! Plus rare en Corse et en Bretagne, l’espèce est commune dans l’hexagone. Vous qui lisez cet article, il y a donc de grande chance que vous ayez du Hibou Moyen-Duc dans un périmètre relativement proche de chez vous.
Même s’il est possible de le retrouver dans différents habitats (friche, verger, zone de culture, parc et jardin, bois clairsemé,…) son préférendum est le milieu prairial constitué d’arbres isolés. En effet, il chasse sur les zones ouvertes et en particulier les milieux herbacés où vit sa proie préférée : le campagnol. Il a également besoin d’arbres isolés pour s’abriter, affûter et y nicher.
En termes d’habitat, la combinaison « zone ouverte / arbres isolés » est donc le facteur n°1 de présence potentielle du Hibou Moyen-Duc.
Le Hibou Moyen-Duc a la particularité d’occuper des secteurs différents selon le moment de l’année. La zone et l’arbre qu’il occupera avec son partenaire pour nicher ne sera le même l’Hiver lorsqu’il rejoint son dortoir*.
Késako un dortoir ?
A partir du mois de Novembre, les Hiboux Moyen-Duc se regroupent sur un site bien précis et fidèle d’une année à l’autre. Il est fréquent de retrouver une dizaine d’individus passer leurs journées dans un même arbre. En Serbie, un petit village détient le record avec un dortoir comprenant 750 individus ! Le Hibou Moyen-Duc affectionne les alignements de conifères, dense grâce au maintien des épines l’hiver. Il est fréquent que ces dortoirs soient situés en zone urbaine ou péri-urbaine. J’ai pu observer un dortoir en plein carrefour d’un petit village dans le Nord de la France ou encore dans des cyprès qui bordaient un stade de foot.
Habitat type du Hibou Moyen-Duc
Allée de résineux propices au Hibou Moyen-Duc
En période de reproduction, le Hibou Moyen-Duc ne rechigne pas à nicher près de l’Homme. J’ai pu en faire l’expérience en 2023 où j’ai suivi deux couples. Le premier a niché sur une exploitation maraîchère à quelques mètres des serres de l’exploitation. Les agriculteurs passaient leur journée à travailler au pied du pin qui accueillait le nid.
Le second couple, je ne pouvais difficilement passer à côté puisqu’il a niché dans le prunier situé à moins de trois petits mètres de notre porte d’entrée !
Localisation d’un nid de Hibou Moyen-Duc
Localisation d’un nid de Hibou Moyen-Duc
Autre facteur déterminant pour le choix du site de reproduction : la présence d’anciens nids de corvidés (pie bavarde, corneille noire ou geai des chênes). Ces nids sont facilement reconnaissables puisqu’ils sont constitués d’un amas de branches et sont situés sur la cime des arbres. Le couple s’établit généralement en février/mars sur le site de reproduction et hormis un ajustement de quelques branches, ils utilisent le nid tel quel.
Nid de corvidés propice au Hibou Moyen-Duc
En résumé, le Hibou Moyen-Duc a besoin :
- lDe zones ouvertes, si possible prairiales pour chasser.
- lD'arbres isolés ou des alignements d'arbres.
- lD'anciens nids de corvidés pour y nicher.
- lDes proies en abondance et en particulier de micro-mammifères.
Vous avez donc maintenant une bonne idée de l’habitat type du Hibou Moyen-Duc, cette connaissance vous est importante pour passer à l’étape suivante : la prospection.
Comment trouver le hibou moyen-duc ?
Comme souvent dans mes quêtes d’espèce, je m’aide dans un premier temps des vues aériennes disponibles sur géoportail ou google maps. Ces plateformes sont une source de données importantes et un moyen de filtrer les zones à prospecter et ainsi de gagner du temps sur la partie « terrain ». N’hésitez donc pas à repérer des habitats qui semblent propices au Hibou Moyen-Duc : zone prairiale et bocagère, arbres isolés, alignement d’arbres et idéalement de conifères…
Habitat type du Hibou Moyen-Duc à partir de géoportail
Le meilleur moyen de prospecter est d’écouter.
Une fois que vous avez pu cibler des habitats propices au Hibou Moyen-Duc, rendez-vous sur les lieux à la nuit tombée à différentes périodes, de février à juin.
De coutume discret et silencieux, le mâle établit son territoire prénuptial grâce à son chant si particulier. Cette étape a lieu généralement au mois de février, voire au mois de mars.
Chant de l'adulte
Si vous avez raté cette étape, pas de panique, une session de rattrapage vous est permise grâce à la discrétion légendaire des jeunes Hiboux Moyen-Duc. Après une couvaison d’environ 25 à 30 jours, les jeunes naissent et lors des premiers jours la femelle reste auprès d’eux. Les jeunes grandissent et la place dans le nid se réduit rapidement au fil des jours. La femelle est alors obligée de quitter le nid pour se percher à proximité et surveiller sa progéniture. Deux semaines après les naissances, les premiers cris des jeunes réclamant leur pitance se font entendre. Pour repérer les jeunes rendez-vous alors sur les sites propices à hibou et réaliser des points d’écoute de mai à juin. Vous ne pourrez passer à côté des jeunes hiboux dont le cri est semblable à une balançoire qui grince !
Calendrier biologique et de prospection du Hibou Moyen-duc
Attention, les dates de reproduction du Hibou Moyen-Duc peuvent être très variables, le couple qui a niché à la maison a par exemple pondu à la fin du mois de mai et nous avons entendu les jeunes pour la première fois toute fin juin. A l’inverse, la littérature évoque des pontes dès le mois de février ! Ces périodes dépendront bien évidemment de la situation géographique.
Il est donc important de prospecter plusieurs fois et à des périodes différentes un même site potentiel.
Jeunes Hiboux Moyen-Duc au nid
Une fois que le gros du travail a été réalisé en identifiant le site de reproduction, il vous faudra préciser un peu votre recherche surtout si plusieurs arbres semblent propices à accueillir la famille de moyen-duc. Repérez les anciens nids de corvidés et surtout scrutez les arbres aux jumelles. Les adultes sont difficiles à repérer mais le duvet grisâtre des jeunes est facilement repérable.
Si vous ne pouvez pas compter sur vos yeux, cherchez les pelotes au pied des arbres potentiels. De taille importante (jusqu’à 65mm de long et 25mm de large), vous ne pourrez passer à côté.
Pelotes de Hibou Moyen-Duc
Après une vingtaine de jours, les jeunes quittent l’arbre accueillant le nid pour se disperser mais restent dans les parages. Lors des premiers vols peu convaincants, les jeunes peuvent se retrouver au sol dans l’incapacité de remonter un arbre et sont vulnérables aux prédateurs (chat, renard, blaireau).
Les jeunes sont alors encore dépendants de leurs parents et crient quasiment sans cesse à la nuit tombée pour quémander leur nourriture. Ces cris peuvent même être audibles en journée.
Durant cette période, les adultes, et en particulier la femelle, restent dans un périmètre proche du site de reproduction pour veiller sur les jeunes. L’arbre et la branche où trouver la femelle ne sont pas systématiquement les mêmes mais je retrouvais fréquemment la femelle sur le même arbre du jardin. Elle y passait sa journée et ne s’inquiétait aucunement de ma présence, il était alors très simple de la photographier. Lors de mon passage elle ouvrait les yeux comme pour vérifier qu’il ne s’agissait pas d’un potentiel prédateur et s’endormait illico. Cette tranquillité diurne contraste avec son activité nocturne.
Femelle de Hibou Moyen-Duc à quelques arbres des jeunes
Trois semaines après leur naissance, les jeunes sont assez habiles pour se disperser au-delà du site de reproduction. Accompagnés de leur mère ils deviennent alors beaucoup plus compliqués à suivre et à photographier. C’est vers l’âge de 7 à 8 semaines, qu’ils deviennent indépendants et partent à la conquête de nouveaux territoire, synonyme d’aurevoir pour le photographe.
Comment trouver un dortoir à Hibou Moyen-Duc ?
Trouver un dortoir est bien plus compliqué. Les hiboux sont en hiver très discrets et il sera quasi impossible de situer un dortoir à partir de phases d’écoute. Etant donné que les hiboux se regroupent, une grande partie des secteurs de reproduction occupés au printemps et à l’été seront désertés. Si vous êtes de nature chanceuse et persévérante vous pouvez toujours prospecter les dortoirs potentiels (observation directe et présence de pelotes au pied des arbres), mais je vous le déconseille.
Pour rappel, les dortoirs sont très souvent situés en zone péri-urbaine ou urbaine. Les hiboux affectionnent passer leur journée d’hiver dans un conifère isolé ou un alignement de conifères.
Le meilleur moyen de photographier le Hibou Moyen-Duc l’hiver est tout simplement de compter sur le bouche à oreille. J’apprécie trouver mes coins moi-même mais pour les dortoirs à Hibou Moyen-Duc il est bien plus simple d’attendre qu’un jour peut être un voisin vous alerte sur la présence de « grosses chouettes » dans son jardin ou celui d’un ami.
Comment photographier le Hibou Moyen-Duc ?
A la période de reproduction :
Une fois le site de reproduction identifié grâce aux phases d’écoute et d’observation, photographier les Hiboux Moyen-Duc est très simple mais nécessite toutefois quelques précautions.
Adultes et jeunes vous repéreront très facilement à votre arrivée mais ne seront pas plus inquiets que ça du moment que vous respectez certaines règles de base :
- lRespectez une distance minimale par rapport à l'arbre accueillant le nid.
- lNe vous attardez pas sur le site de reproduction, un passage de cinq à dix minutes est suffisant pour vous permettre de réaliser quelques clichés sympas.
- lRestez discret et silencieux.
- lN'utilisez surtout pas de technique de repasse.
- lNe touchez surtout pas aux arbres accueillant le nid et aux arbres périphériques ainsi qu'à leurs branches.
Je n’utilise pas d’affût ni d’équipement de camouflage particulier pour photographier le Hibou Moyen-Duc. J’utilise du matériel de camouflage (tente ou filet) uniquement pour le photographier sur ses zones de chasse qui sont souvent les prairies périphériques au nid.
Le saviez vous ?
Vous avez très certainement déjà pu voir des vidéos de chouettes ou hiboux bouger étrangement leur tête, mais savez pourquoi ils font ces curieux de mouvement ?
Tout simplement parce que les strigidés ne peuvent bouger leurs yeux. Ils bougent ainsi la tête pour « trianguler » l’espace permettant ainsi de localiser précisément une proie ou un éventuel danger.
Au dortoir :
Photographier le Hibou Moyen-Duc au dortoir est très simple une fois le site connu.
A votre arrivée les hiboux vous remarqueront, ouvriront les yeux quelques secondes pour les refermer quasiment aussi tôt. Comme pour la photographie sur le site de reproduction, gardez une distance de sécurité du pied de l’arbre d’environ vingt mètres. Restez discret et silencieux, ne touchez bien évidemment surtout pas aux branches ni au tronc. Nul besoin de rester planter là toute la journée, il est préférable de venir plusieurs jours pendant quinze minutes. Dans ce cas, les hiboux s’habitueront à votre passage régulier et vous pourrez bénéficier de conditions de lumière différentes si vous passez à des jours et des moments de la journée différents.
Avec du bon sens et du respect vous pourrez très facilement photographier les Hiboux Moyen-Duc et bénéficier d’un spot remarquable et durable puisque les hiboux sont fidèles d’année en année à un dortoir s’ils ne sont dérangés.
Salut Bastien,
j’espère que tu vas bien, ainsi que Camille.
Excellent article sur les HMD, bravo et Merci.
La chance appartient aux audacieux…
pour les HMD qui logent chez vous.
Pour nous c’est la bonne période pour observer les butors étoilés.
Ns avons de la neige aujourd’hui ici dinch’ Nord!!!
Bonne continuation les Z’Amoureux !!!
Jean-Pierre C.
http://jpnature.blogspot.fr
Bonjour Jean-Pierre ! Contents d’avoir de tes nouvelles et merci pour ton message ! Nous allons très bien et nous espérons qu’il en est de même pour toi. Tes photos de butor au dessus de la roselière sont juste superbes… Je pense reconnaître l’endroit 😉 ! Bonne continuation à toi et j’espère bien que nos routes se recroiseront en Corrèze, dans le Nord ou en Belgique !
Merci pour ce merveilleux reportage!
Nous avons à deux reprises trouvé des nichées mais pour les dortoirs c’est en effet une autre histoire
Bises à vous deux
Merci à vous deux ! En effet trouver un dortoir c’est pas évident du tout et pourtant il semblerait qu’ils soient relativement nombreux… Au plaisir de vous revoir Valérie et Cyril !
Bonsoir,
Bravo pour cet article juste fabuleux.
J’apprécie votre façon de transmettre votre passion pour la nature et ses animaux. Je pratique moi aussi la photographie animalière.
Je vous avez rencontré lors d’un salon l’année dernière dans l’Allier.
Continuer à promouvoir la nature et comme vous le mentionnez très bien à respecter les espèces photographiées. La sensibilité et l’éthique des photographes est très importante pour ne pas déranger les animaux.
Merci bien pour cette fiche très technique sur ce bel oiseau. Continuer à nous émerveiller.
Bonsoir Florent ! Ca fait chaud au cœur votre commentaire ! Un immense merci à vous pour l’intérêt de notre travail et d’avoir pris le temps de nous écrire ! En effet, on ne dira jamais assez qu’il est impératif de ne pas déranger pour une photo « à tout prix » ! Encore merci et au plaisir !
Toujours un plaisir de lire ce blog!!
Content de t’avoir croisé à Montier et j’espère que cela t’apportera tout ce que tu peux souhaiter !!
au plaisir
François
C’est très sympa de ta part François !
Nos chemins se recroiseront forcément, peut être en Italie ? 😉 Je t’avoue que notre discussion à Montier m’a un peu motivé à bouger de ma Corrèze 😉
Au plaisir également.
très instructif, mais je me demandais si le grand duc revient plusieurs années de suite sur le m^me nid?
merci
marie odile
Bonjour Marie-Odile,
Alors le grand duc oui, il est relativement fidèle à son territoire et son aire de reproduction. Par contre pour le Moyen-duc qui fait l’objet de cet article, c’est beaucoup plus aléatoire… Les nids de Moyen-duc se dégradent plus facilement puisqu’il est constitué uniquement d’amas de branches. Il est également régulier que les nids de Moyen-duc soient occupés par d’autres espèces de corvidés.