• Bastien
  • 27/02/2021
  • Focus espèce

Le cincle plongeur est un oiseau capable de nager, de s’immerger totalement dans les eaux turbulentes et glaciales, de progresser sous l’eau face aux rapides. Cet oiseau m’a toujours intéressé et même fasciné. Arrivé dans le Cantal en 2020, mon immersion chez les cincles plongeurs a été inéluctable. Tout au long de l’année, j’ai multiplié les sessions d’affût sur un cours d’eau non loin de la maison. J’ai pris un plaisir immense à photographier le cincle plongeur mais surtout à les voir pêcher, à les voir grandir, à assister à leurs querelles mais aussi à rencontrer leurs voisins…

Nous avons souhaité vous partager ces moments et vous inviter vous aussi à plonger à sa découverte. Nous vous donnerons tous les conseils et astuces pour vous aider à observer et à photographier le cincle plongeur, car croyez nous il vaut la peine de se jeter à l’eau !

Le cincle plongeur : qui est-il ?

Le cincle plongeur est surnommé le « merle d’eau » en référence au merle noir de nos jardins de part leurs ressemblances physiques. Il s’agit du seul passereau capable de s’immerger totalement dans l’eau : il doit cette capacité à ses os particulièrement denses. Facilement reconnaissable grâce à sa poitrine blanche, le cincle plongeur est l’une des icônes des cours d’eau préservés. À la recherche d’insectes aquatiques, il a pour habitude de se percher sur les pierres émergeantes avant de plonger dans la rivière.

Cincle plongeur adulte

Cincle plongeur adulte : plumage brunâtre

Une loge de pic noir

Jeune cincle plongeur : plumage grisâtre

Où vit-il ?

Vous ne le trouverez que sur les rivières suffisamment pentues pour offrir des rapides et des sédiments grossiers (tels que les pierres et les blocs). Le cincle plongeur est plutôt bien présent en France. Sa population est même établie dans quasiment tous les départements avec de très belles concentrations dans les régions à relief comme l’Est de la France et les Pyrénées. J’ai d’ailleurs eu l’occasion de l’observer dans le Nord où quelques couples sont installés sur deux, trois cours d’eau de l’Avesnois.

Habitat typique du cincle

Habitat typique du cincle plongeur

Comment le trouver ?

Il s’agit là d’une généralité en photographie animalière mais une fois l’habitat de l’espèce bien en tête, il vous faudra prospecter encore et encore. Munissez vous de vos jumelles, de vos bottes, éventuellement d’une carte, arpentez et scrutez les cours d’eau potentiels et tendez bien l’oreille.

Prospection

En cours de prospection (été 2020)

Très souvent, lors de ses déplacements, le cincle plongeur émettra un « zit » bref, bien marqué et facilement reconnaissable. Vous pouvez écouter ses différents cris et chants ici.

Prospection

Si vous ne le voyez pas ou ne l’entendez pas, un indice infaillible trahit sa présence : les fientes sur les blocs émergeant du cours d’eau. Si vous observez ces traces blanches sur ces perchoirs, vous avez certainement trouvé un tronçon de cours d’eau occupé par notre ami. Les crues nettoyant les blocs, sa présence est donc relativement récente. 
Le territoire du cincle est peu important, de l’ordre d’un kilomètre de cours d’eau, ce qui facilitera grandement votre travail de prospection.

Fiente de cincle

Fiente de cincle sur un rocher

Comment photographier le cincle plongeur ?

Vous voilà dans le vif du sujet, vous avez trouvé un tronçon de rivière où le cincle plongeur est présent. N’hésitez pas à y retourner plusieurs fois afin de connaître ses habitudes, ses perchoirs de prédilection mais aussi les endroits possibles pour affuter. Cet exercice sera particulièrement important quitte à laisser l’appareil photo à la maison.

Trouver le bon spot

Pour le photographier dans les meilleures conditions, un affût sera indispensable. Il faudra vous mettre au même niveau que les cincles pour éviter l’effet dit de contre-plongée, pour cela choisissez un spot au ras de l’eau. L’utilisation de wadders est donc presque indispensable. Pour me fondre dans l’environnement, je m’installe très souvent à côté d’un bloc.

Une loge de pic noir

Affût camouflé

J’affute de manière à avoir plusieurs perchoirs en ligne de mire et un espace suffisant avec l’arrière-plan de façon à soigner le bokeh. Osez le contre-jour, je trouve que cela permet d’obtenir des photos vraiment originales.

Une loge de pic noir

Avoir le bon matériel

  • lDes wadders ;
  • lUn trépied (pour remédier au manque de lumière récurrent près des cours d'eau) ;
  • lUne focale assez importante (minimum 400 mm) ;
  • lUne housse protectrice contre l'eau pour le boitier et l'objectif ;
  • lUn ghillie ou un filet de camouflage.

Je n’utilise pas de housse anti bruit, le bruit de l’eau camoufle bien le déclenchement du boitier.

Quand photographier le cincle plongeur ?

Il est possible de le photographier toute l’année, mais selon moi trois périodes de l’année sont particulièrement intéressantes pour photographier le cincle plongeur  :

D’octobre à novembre

À cette période les couleurs d’automne peuvent vous procurer de superbes ambiances grâce aux reflets et à la lumière bien particulière, c’est l’occasion d’en avoir plein les yeux et d’obtenir des clichés plus originaux.

De janvier à mars

Lors de la période de territorialité et de séduction. Même si les parades ont lieu toute l’année, elles sont bien plus nombreuses à cette période. Les mâles défendent âprement leurs territoires et les courses-poursuites sont fréquentes.

Parade du cincle

Les cincles peuvent rester fidèles plusieurs années et passer l’hiver ensemble. Ils utilisent également les mêmes nids qu’ils réhabilitent si nécessaire. Les nids sont de forme sphérique, ressemblant à un « amas » de mousses. Ils se trouvent très souvent sur une paroi rocheuse ou sur un ouvrage d’art surplombant le cours d’eau. L’entrée se fait par le bas, les prédateurs ont donc plus difficilement accès au nid.

Nid de cincles

Nid de cincles sous un pont

De avril à juin

Il s’agit de la période de nourrissage et d’élevage des jeunes. Les va-et-vient des adultes au nid sont nombreux pour alimenter les jeunes (qui peuvent être jusqu’à 6). Le mâle et la femelle sont alors en recherche constante de nourriture. Le couple assure deux couvées, une première en avril et une seconde généralement fin mai. Entre temps les adultes s’affairent à nettoyer le nid et à le préparer pour la seconde couvée.

Nourrissage

Nourrissage des jeunes

Une fois les jeunes sortis du nid, le travail de nourrissage est encore plus important et les jeunes affamés se font même oppressants… Les juvéniles ne laissent alors aucun répit aux jeunes parents, c’est d’ailleurs assez marrant à observer.

Les premiers pas des jeunes hors du nid sont l’occasion de bénéficier d’une proximité assez grande. Les jeunes sont peu farouches et il n’est pas rare qu’ils s’approchent de votre affût pour réaliser leurs premières pêches peu habiles.

Premières pêches

Afin de limiter le dérangement dans une période cruciale pour l’espèce, ne tentez pas d’approche près du nid lorsque la femelle est en train de couver. L’utilisation d’un affût est selon moi indispensable. L’approche du cincle en billebaude se conclue rarement par un succès et vous le dérangerez à coup sûr.

Lors de mes affûts j’observais régulièrement un arrêt total du nourrissage voire même de la couvaison à l’approche d’un pêcheur ou d’un randonneur du nid. Les adultes ne prennent aucun risque de dévoiler l’emplacement du nid et attendrons le temps nécessaire pour s’assurer de l’absence de menace. Ne persistez donc pas si votre affut n’est pas assez discret aux yeux des cincles, vous risquez de menacer la couvée. 

 

Et de belles rencontres

Affuter au bord des cours d’eau c’est aussi vous laisser la possibilité de faire de belles rencontres. Ces milieux regorgent de vie et l’activité y est souvent importante. Lors de mes longues heures d’affût chez les cincles, j’ai eu l’occasion de photographier leurs colocataires de rivière en tête d’affiche : bergeronnette des ruisseaux et martin pêcheur. Et j’ai certainement vécu le moment le plus intense et le plus dingue de ma courte vie de photographe.

Un moment privilégié avec la loutre.

C’était un matin de novembre, je suis en place depuis deux bonnes heures et les cincles ne sont pas très coopératifs. J’ai toutefois deux individus en ligne de mire, à environ 50 mètres, ils sont posés chacun sur un bloc. Je ne bouge pas d’un poil, mon affût est bien placé je pense être totalement camouflé. Les minutes passent et le petit couple ne semble pas décidé à s’approcher.

Tétanisé par le froid de l’eau je me décide de m’étirer un peu. Je sens alors une présence sur ma gauche, je tourne la tête et bouche bée j’aperçois à un ou deux mètres, une petite tête émergée de l’eau avant de disparaître lentement. Je me dis alors que le froid m’a suffisamment atteint pour avoir des visions de loutre. Une poignée de secondes plus tard, cette petite tête avec des oreilles toute ronde, apparaît cette fois ci juste en face de moi, à environ un mètre. Nos regards se figent, cette fois-ci j’en suis sûr : ce n’est pas une hallucination. La loutre replonge pour apparaître une troisième fois sur ma gauche, en plein courant. Je déplace légèrement mon appareil pour tenter d’immortaliser ce moment mais c’est le mouvement de trop, elle a compris que cette forme étrange n’était ni un minéral, ni un végétal. Malgré mon extrême vigilance je ne la reverrai plus. La loutre a disparu comme elle a apparu, avec une discrétion déconcertante.

Une loge de pic noir

La Loutre d’Europe

Bastien & Camille

4 Commentaires

  1. Jean-Pierre Cappe

    Bonsoir Bastien.

    Comment vas tu ?
    J’ai beaucoup apprécié ton reportage sur le cincle plongeur, bravo.
    J’ai également eu la chance de croiser sa route en juillet 2019, en Belgique. Quel oiseau intéressant !!!
    Bravo pour ton site. Beaucoup de belles rencontres à partager.
    Merci et… Peut-être à un de ces jours… qui sait… dans le Cantal.
    Bonne continuation, à vous deux.

    Jean-Pierre Cappe.
    http://jpnature.blogspot.fr

    Réponse
    • Bastien

      Bonjour Jean-Pierre !

      Tout va très bien, j’ai quitté le Nord de la France pour nous installer à deux pas de l’Auvergne l’été dernier. Et toi comment vas tu depuis notre escapade aux rémiz penduline en Belgique ?! Ca fait déjà un petit moment..
      Merci pour ton message qui me, nous, fait bien plaisir !
      Je serai ravi de repartager une journée photo avec toi, tu es la bienvenue par chez nous !

      J’espère que tout roule pour toi, d’après ce que j’ai vu sur ton site tu as installé une drink chez toi également ?

      Amitiés et au grand plaisir.
      Bastien

      Réponse
  2. Lê

    Bonjour,
    Je viens de regarder votre site qui est très sympathique.
    Vous dites, en répondant à Jean-Pierre que vous avez déménagé en Auvergne ? Vous n’êtes donc plus dans le Jura ?
    Dommage je comptais y aller en avril prochain et j’étais à la recherche d’un accompagnateur pour le cingle plongeur…
    Merci en tous cas de vos images.
    Cordialement.
    Annie

    Réponse
    • A notre image

      Bonjour Annie !
      Merci pour votre commentaire bien sympa 🙂
      En effet, je suis dorénavant installé en Haute Corrèze et je suis les cincles principalement dans le Cantal.
      Ca aurait été un plaisir de vous accompagner pour le photographier mais le Jura est bien trop éloigné de notre nouvelle résidence… Toutefois, d’ici environ 2 ans nous proposerons très certainement des stages photos à thème et spécifique à certaines espèces comme le cincle plongeur. Nous souhaitons proposer un hébergement sur place qui pourrait permettre au stagiaire de profiter du coin quelques jours. Si toutefois cela vous intéresse nous pouvons toujours rester en contact.
      Au plaisir et bonne chance pour avril prochain, cet oiseau vaut vraiment la peine de se jeter à l’eau 😉
      Merci à vous. Bastien

      Réponse

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